Tunisie : Le FMI prévoit une croissance de 2,7% en 2019 contre 3,1% prévue par la Loi de finances

A l'issue de la dernière mission de l'équipe du FMI à Tunis, et à sa tête Björn Rother, le Fonds a commenté dans un communiqué du 9 avril 2019 les principales conclusions de cette visite. Le FMI affirme s'être mis d'accord avec les autorités sur la plupart des points et mesures de la politique gouvernementale abordés, dont certaines nécessiteront des délais supplémentaires pour leur mise en œuvre. Les discussions se poursuivront à Washington dans les jours à venir.

Le FMI constate par ailleurs, que les efforts pour soutenir la croissance par la maitrise de l'inflation et de la dette publique commencent à porter leurs fruits, selon le communiqué. Toutefois, l'économie tunisienne demeure globalement fragile. Les autorités sont « conscientes des risques qui pèsent sur l'économie et comptent traiter les déséquilibres sur les plans fiscal et extérieur dans cette année électorale ».

Björn Rother, qui dirigeait la délégation du FMI dans le cadre de la cinquième revue, du 27 mars au 09 avril, a qualifié les discussions de « constructives », ayant pris connaissance de l'agenda des autorités en matière de réformes en tenant compte de la spécificité de la période, élections présidentielles et législatives obligent.

Le communiqué revient sur l'amélioration "modeste" observée au niveau de la croissance économique, qui devrait atteindre 2,7% en 2019 contre 2,6% l'année dernière. La croissance en 2018  a été soutenue par les performances des secteurs agricole et des services, en particulier le tourisme.  L'activité économique continue cependant de souffrir des incertitudes, notamment politiques, et reste en proie aux vulnérabilités macroéconomiques, souligne le FMI. Le rythme de la croissance demeure insuffisant pour permettre un progrès notable dans la création d'emplois avec des niveaux de chômage qui restent très élevés, notamment chez les jeunes et les femmes, insiste le fonds.

Le FMI a également évoqué le resserrement monétaire opéré par la Banque Centrale de Tunisie pour parer à la montée de l’inflation, ainsi que la réduction du déficit budgétaire. Les revenus se sont améliorés en 2018 grâce aux mesures fiscales adoptées et au renforcement des mécanismes de collecte ; parallèlement, les augmentations des prix de l'énergie ont permis de limiter la hausse des subventions. Cette démarche a profité à l'investissement public et aux programmes sociaux, dont les dépenses ont représenté respectivement 5,6 et 2,7% du PIB en 2018. Le programme d'assistance aux familles vulnérables a vu sa couverture augmenter de 250 à 285 mille familles, constate le FMI, qui voit aussi une amélioration au niveau de l'accès aux soins médicaux.

Le communiqué insiste aussi sur la croissance qui « reste fortement dépendante de la consommation, alors que l'investissement et les exportations affichent un dynamisme toujours modéré et insuffisant ». La dette publique et extérieure exacerbe en parallèle les besoins de financements, et constitueront un grand fardeau pour les générations futures, indique le communiqué. Enfin, l'inflation qui dépasse toujours les 7% continue de menacer le pouvoir d'achat, spécialement des catégories les plus vulnérables.

Le fonds insiste sur la nécessité d'accélérer les réformes structurelles, pour améliorer la gouvernance et le climat des affaires dans le pays, qui permettront entre autres de libérer le potentiel du secteur privé et offrir de nouvelles opportunités et de création d'emplois. Le FMI recommande de poursuivre la réduction du déficit budgétaire, d'oeuvrer à renforcer les réserves en devises, et de maintenir le resserrement de la politique monétaire. Les autorités devront porter une attention particulière envers les ménages les plus vulnérables, pour maintenir au mieux la stabilité sociale et soutenir la transition politique dans le pays. La question de la masse salariale dans la fonction publique reste fondamentale, explique le FMI, qui rappelle que la Tunisie affiche un des taux les plus élevés au monde, rapporté au PIB. Il s'agira de libérer plus de fonds pour les dépenses « cruciales » destinées aux catégories les plus nécessiteuses, à l'éducation et la santé. Le pays fait aussi face à de nouveau défis extérieurs, note le Fonds, qui se réfère au ralentissement de la croissance chez les partenaires européens et à de nouveau débordements dans certains conflits de la région, ce qui rend l'agenda encore plus urgent aux yeux du FMI, qui admet que certaines mesures auront un impact sur la population, d'où l'importance  du renforcement du filet de sécurité sociale pour accompagner les réformes.

Pour le FMI, « Une nouvelle accélération des réformes structurelles, notamment pour améliorer la gouvernance et l'environnement des affaires, est nécessaire pour renforcer la confiance. Ces efforts contribueront à libérer le potentiel du secteur privé et à générer plus d'opportunités et d'emplois pour tous les Tunisiens ».

L'équipe du FMI, s'est entretenue avec le chef du gouvernement, Youssef Chahed, et le ministre des finances, Ridha Chalghoum, le ministre du développement et de la coopération internationale, Zied Laadhari, ainsi que Taoufik Rajhi, ministre auprès du chef du gouvernement chargé des grandes réformes et Marouane El Abbassi, gouverneur de la banque centrale. La délégation a également rencontré des membres des centrales syndicale et patronale, des représentants du secteur privé et de la société civile, et des diplomates.

 

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