La Bourse de Tunis et le CMF lancent le Guide de Reporting ESG

Ancrer le développement durable et la RSE dans la vie des entreprises tunisiennes, cotées ou non, tel était l'objectif de la présentation ce jeudi 2 décembre 2021, du Guide de Reporting Environnemental, Social et de Gouvernance (ESG), par la Bourse de Tunis et le CMF, élaboré avec le concours de KONRAD ADENAUER STIFTUNG, et le cabinet Key Consulting.

L'ESG s'inscrit dans le cadre l'initiative Sustainablre Stock Exchange, promue par les Nations Unies, et qui fédère aujourd'hui une centaine de bourses à travers le monde, dont la Bourse de Tunis qui y a adhéré en 2016. La communication extra financière, servira pour les entreprises à communiquer à leur environnement leur démarche environnementale, sociale et de gouvernance, et leur adhésion aux principes du développement durable.  

Le Directeur Général de la BVMT, Bilel Sahnoun a rappelé, pour son mot d'introduction, la tendance mondiale qu'est devenue la finance durable, avec les obligations qui en découlent, traduites entre autres par les directives RSE de l'Union Européenne en 2014, puis par l'adoption par les Nations Unies des 17 objectifs du développement durable (ODD). Cette nouvelle donne a incité le monde de la finance à s'impliquer de plus en plus dans cette thématique de RSE, avec l'émergence de fonds verts, de fonds bleus, de Social bonds, etc. Pour illustrer l'ampleur de ce phénomène, Bilel Sahnoun a fait savoir qu'en 2020, les émissions mondiales de green bonds ont atteint 400 milliards d'euros. Pour prendre part à cet élan, la Tunisie a promulgué en 2018, une loi sur la RSE, dont les textes d'application n'ont toujours pas été publiés. Le CMF a lui aussi travaillé sur un cadre réglementaire pour l'émission d'emprunts verts, avec la Banque Mondiale. Le guide de reporting ESG vient enrichir les outils du pays pour aider les entreprises à véhiculer les bonnes pratiques.

La mise en place de ce guide a reçu le soutien de plusieurs institutions nationales, dont la Banque Centrale (BCT), la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), la Tunisian Investment Authority, la Direction Générale du Financement au sein du ministère des finances, le Comité Général des Assurances, la FTUSA, etc. Ses principaux objectifs seront d'identifier et de structurer les communications extra financières et d'en unifier la lecture et l'interprétation pour des besoins d'analyse, de classification et de comparabilité, pour créer un indice ESG afin d'attirer les fonds d'investissements sensibles à la finance verte, outre les critères de rentabilité de leurs investissements. La Tunisie tente aujourd'hui de saisir les opportunités des financements verts, dont la majorité dans la région MENA, soit 1,5 milliards de dollars, ont été captés par le Maroc et l'Egypte, contre seulement 15 millions de dollars en Tunisie, essentiellement via des programmes de l'Agence Nationale de Protection de l'Environnement. Les entreprises tunisiennes seront également de plus en plus confrontées aux contraintes de la RSE dans leurs interactions avec leurs partenaires, notamment européens. A titre d'exemple, la taxe carbone pourrait devenir dès 2023 une barrière à l'entrée après son adoption sur le vieux continent. Bilel Sahnoun a invité les entreprises tunisiennes à s'aligner sur les pratiques mondiales en matière de RSE, avec pour mots d'ordre People, Planet, Profit.

Préalablement à l'élaboration du guide, une enquête a été menée pour un diagnostic sur la situation de la RSE en Tunisie, qui montre le chemin encore très long à parcourir, et le gap qui sépare les entreprises tunisiennes avec leurs pairs des pays développés. L'enquête menée auprès de 42 sociétés cotées à la Bourse de Tunis, a révélé la place encore très marginale accordée par les entreprises à la RSE. Ainsi, seulement 19% des sociétés sondées se sont réellement mobilisées en matière de RSE (dont seulement 14% disposent d'un service dédié), avec des niveaux d'engagement très disparates. 40% de ces entreprises ont déjà commencé à mettre en place des actions RSE et 31% n'en ont pas encore identifié les enjeux liés à leurs activités.


Chez 86% des entreprises "actives" sur le thème de la RSE, cette fonction est associée à plusieurs autres fonctions, comme la RH ou le Marketing, et ne dispose donc pas d'un service qui lui est propre.

L'enquête a montré que seule une entreprise sur 5 de l'échantillon a développé des indicateurs de mesures pour son engagement. Il en ressort aussi qu'une société sur 3 n'a aucune connaissance des référentiels RSE ; l'ISO 26000 est le plus connu, par 60% des entreprises du panel. La notion d'ODD (Objectif de Développement Durable), est également étrangère à 4 sociétés sur 5 selon le sondage, tout comme les stratégies nationales liées à la RSE, dont 50% des dirigeants d'entreprises interrogés ignorent l'existence. Par ailleurs, seules 28% des entreprises sondées associent les démarches RSE à l'innovation.

Les entreprises tunisiennes ont donc un long chemin à parcourir pour se mettre à niveau sur le plan de la RSE et des ODD. Outre les avantages et les impacts prouvés sur les performances financières, il s'agira de se prémunir des handicaps qui découlent du non-respect des pratiques aujourd'hui partie intégrante des stratégies des entreprises dans les économies développées et qui deviennent de plus en plus une obligation pour opérer dans plusieurs domaines. Le guide ESG lancé aujourd'hui sera un support de taille pour les sociétés désireuses de se positionner en conformité avec les référentiels mondiaux, et de communiquer en toute transparence leurs démarches et leurs actions, traditionnellement à la discrétion du management.

 

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