El Abassi: « Tout sauf l’inflation »; Circulaire imminente pour les Start Up; Appel à une amnistie de change; Hedging sur le pétrole; 2,6% de croissance en 2018 et appel à la concentration des banques.

Le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie (BCT), Marouene El Abassi, a annoncé jeudi 24 janvier 2019 à Tunis l’imminence de la publication d’une nouvelle circulaire de l’Institut d’émission qui fixera le régime de change des entreprises tunisiennes bénéficiant du statut de Start Up prévu par le Start Up Act. Il a indiqué que ces entreprises auront une large liberté au niveau de leurs opérations de change.

Le gouverneur, qui s’exprimait à l’occasion du déjeuner-débat mensuel des Alumni IHEC Carthage, a ajouté, par ailleurs, qu’il était favorable à une refonte du code de change pour les opérateurs économiques et les citoyens tunisiens dans le sens d’une plus grande flexibilité leur permettant, entre autres, d’ouvrir des comptes en devises étrangères en Tunisie. Néanmoins, il a exigé, au préalable, la promulgation d’une amnistie de change et d’une amnistie fiscale afin d’inciter les tunisiens à rapatrier leurs avoirs à l’étranger dans de bonnes conditions. Le projet d’amnistie de change a été soumis à l’ARP (parlement) pour discussion et adoption depuis plus d’une année!

Évoquant sa manière de fonctionner, El Abassi a affirmé travailler en étroite collaboration avec le gouvernement pour le bien du pays mais tout en défendant jalousement l’indépendance de la Banque centrale et il a appelé à ce que chacun soit dans son rôle et à tenir la BCT loin des considérations de politique politicienne. Le gouverneur a rappelé que sa principale mission est de combattre l’inflation en martelant: « Tout sauf l’inflation ». Il a ajouté qu’il était prêt à augmenter encore une fois le taux directeur de l’institut d’émission, chaque fois que l’inflation reparte à la hausse.

Pour ce qui est de sa lecture de la situation économique de la Tunisie, Marouene El Abassi a annoncé que le pays a enregistré une croissance de 2,6% de son PIB en 2018. Il juge que la croissance de 3,1% prévue par le gouvernement est « réalisable » et que le pays pourrait même la dépasser sous certaines conditions.

Le gouverneur, qui était accompagné de plusieurs directeurs généraux de la BCT, a indiqué que son institution a fait recours pour la première fois aux techniques de « hedging » pour prémunir le pays contre la volatilité des prix du pétrole à l’échelle internationale. Il estime que personne n’est en mesure de «  prévoir les cours sur six mois ». Grâce au hedging, le prix du baril supporté par la Tunisie « ne devrait pas dépasser les 64$ » en 2019, même en cas de hausse sur le marché international.

Interpellé sur la récente annonce du groupe BNP Paribas de son intention de céder sa participation dans l’UBCI, le gouverneur a affirmé que cela rentrait dans le cadre de la stratégie de « Derisking » de plusieurs groupes bancaires internationaux qui sont en train de sortir de certains marchés africains, entre autre raisons, afin d’éviter les risques de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Il a cité, également, le cas de la BTK dont les actionnaires français comptent céder leur participation au groupe bancaire marocain « Banque Populaire ».

En outre, Marouene El Abassi a incité les banques tunisiennes à se regrouper  pour faire émerger des champions régionaux capables de rivaliser à l’international. Il a fustigé le fait que le PNB bancaire tunisien soit réalisé par 23 banques, signe flagrant de fragmentation du secteur appelant à une concentration de ses acteurs.

Le gouverneur de la BCT et ses collaborateurs Raoudha Boukadida et Brahim Binous, directeurs généraux à la Direction Générale des opérations de change, ont, également, exposé les actions de la Banque centrale en matières de « decashing » ( notamment avec la publication de la circulaire relative aux établissements de paiement) et d’assistance des opérateurs économiques du pays ( numéro vert, procédures, etc.).

Le déjeuner-débat des Alumni IHEC Carthage avait débuté par un exposé exhaustif du banquier Walid Jaafar sur la politique monétaire tunisienne et sur les réalisations de la BCT depuis près d’une année suite à la nomination de Marouene El Abassi à sa tête.

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